(La BCEAO constate 945.709 cas de fraude à hauteur de 2,13 milliards FCFA en 2021)
La Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’ouest (BCEAO) a rendu public, via son site internet, son rapport semestriel de surveillance des moyens et services de payement à fin décembre 2021. Ce rapport procède à une synthèse des échanges avec les acteurs du marché et analyse les évolutions de l’activité au cours du second semestre 2021. Il met en exergue les risques émergents dans le secteur de la monnaie électronique ainsi que les mesures prises par la Banque Centrale et les émetteurs pour les maîtriser. Les actions menées par la BCEAO en vue de la surveillance des services de transfert rapide d’argent sont également présentées.
Luc TOSSOU
Le nombre d’opérations de monnaie électronique durant le second semestre est ressorti à 2,97 milliards évalué à 35.649,93 milliards de francs CFA contre 2,42 milliards représentant une valeur de 25 465,57 milliards de francs CFA le semestre précédent soit des hausses de 22,73% en volume et de 39,99% en valeur. Cette hausse s’explique essentiellement par les fêtes fin d’année et les baisses tarifaires opérées par les acteurs du marché. Ces opérations se répartissent comme suit : opérations nationales (intra-pays) : 2,96 milliards de transactions pour une valeur de 34.847,87 milliards de francs CFA, correspondant à 97,75% de la valeur totale des opérations ; transferts inter-pays de l’UEMOA : 14,63 millions de transferts pour 755,56 milliards de francs CFA (2,12% de la valeur totale des opérations) ; réception de fonds internationaux sur les comptes de monnaie électronique : 732 243 transactions pour une valeur de 46,49 milliards de francs CFA (0,13% de la valeur totale des opérations).
La BCEAO constate 945.709 cas de fraude à hauteur de 2,13 milliards FCFA en 2021
Les cas de fraude se sont établis pour le compte de l’année 2021 à 945.709 pour la bagatelle de 2,13 milliards FCFA. En effet, ils ont été évalués à 310.274 pour une valeur de 1,07 milliard FCFA au second semestre 2021 contre 635.435 fraudes évaluées à 1,06 milliard FCFA à fin juin 2021, soit une baisse de 51,17% en volume et une hausse de 1,00% en valeur. Les cas de fraude sont essentiellement liés à l’ingénierie sociale, en particulier les arnaques des clients via le code OTP ; les arnaques des clients suite à une erreur de dépôt ; les arnaques des clients via le paiement marchand ; les arnaques des clients via le E-commerce ; les arnaques des points de vente (PDV) via l’utilisation de faux billets de banque. Les émetteurs de monnaie électronique poursuivent les actions de sensibilisation et de lutte contre la fraude afin de préserver la confiance des usagers et renforcer la protection de leurs fonds. Les principales mesures prises sont la limitation du délai de validité du code de sécurité (OTP) ; la limitation des retraits journaliers et hebdomadaires ; le blocage des comptes bénéficiaires ; la mise en œuvre de procédures de recouvrement des comptes bénéficiaires ; la mise en place d’un modèle de détection des transactions suspectes ; la limitation du montant des paiements marchands à 50 000 francs CFA.
Au cours de la période sous revue, le nombre de réclamations reçues par les émetteurs de monnaie électronique s’est établi à 2,65 millions. Elles concernent essentiellement des erreurs sur les comptes bénéficiaires de dépôts ; des modifications de numéros de téléphone ; des annulations de transferts ; des erreurs sur les comptes bénéficiaires de transferts de fonds.
Au cours du second semestre 2021, l’analyse des dossiers relatifs aux produits et aux services innovants a mis en évidence les principaux constats notamment des actions de communication non-conformes aux exigences réglementaires ; un non-respect des plafonds réglementaires des cartes prépayées ; une subrogation de l’émetteur par le partenaire technique ; des conditions de remboursement des utilisateurs non-conformes aux exigences réglementaires ; des exigences techniques non-conformes aux dispositions réglementaires.
Au regard des risques relevés, les acteurs concernés ont été enjoints de prendre les mesures nécessaires afin de veiller à ce que les actions de communication à l’endroit du public indiquent clairement la banque comme promoteur du service de réception de transfert rapide d’argent sur les comptes de monnaie électronique ; veiller au respect des plafonds fixés par les dispositions de l’article 31 de l’Instruction n°008-05-2015 relative aux conditions et modalités d’exercice des activités des émetteurs de monnaie électronique dans les Etats membres de l’UMOA ; réviser les Conditions Générales d’Utilisation (CGU) pour se conformer à l’article 35 de l’Instruction n°008-05-2015 relatif aux conditions et modalités de remboursement ; réviser les contrats de partenariats techniques afin de mettre les exigences techniques en conformité par rapport aux dispositions des 7 et 26 de l’Instruction sur la monnaie électronique.
Par ailleurs, il convient de signaler que dans le cadre des travaux du Comité FinTech, il a été élaboré une cartographie des risques liés à l’innovation financière dans l’Union. Cette activité a notamment pour objectifs de retracer les pratiques mises en œuvre par les FinTech pour l’identification, la cotation et la gestion des risques inhérents aux services qu’elles fournissent et d’identifier des évolutions réglementaires pouvant contribuer à renforcer la maîtrise des risques liés aux activités des FinTech et à leurs offres de services.
Les échanges avec les acteurs du marché ont essentiellement porté sur les problématiques relatives à l’encadrement de la tarification des services financiers numériques et la réglementation des FinTech dans l’Union.
Encadrement de la tarification des services financiers numériques
Au regard des évolutions récentes observées en matière de tarification des services financiers numériques, certains émetteurs ont exprimé leurs inquiétudes y relatives et ont plaidé pour une réglementation du marché par la BCEAO. Ainsi, la Banque Centrale définirait des prix indicatifs pour les différents services à l’image des taux indicateurs du secteur bancaire et de la microfinance. En réponse, il a été rappelé que la réglementation actuelle de l’activité de monnaie électronique vise une concurrence saine entre les acteurs. A cet égard, le respect du cadre réglementaire demeure une priorité pour la BCEAO et fait l’objet d’un suivi attentif, dans un secteur digital en constante évolution, en particulier concernant la monnaie électronique.
De manière spécifique, il y a lieu de noter que l’Instruction n°008-05-2015 relative aux conditions et modalités d’exercice des activités des émetteurs de monnaie électronique dans les Etats membres de l’UMOA, n’encadre pas la tarification des services financiers numériques. Toutefois, ce texte fait obligation à l’établissement émetteur de mettre à la disposition de sa clientèle, de façon accessible, les conditions tarifaires applicables à ses opérations.
Développement des Fintech dans l’Uemoa
Les préoccupations des émetteurs sur ce point portaient sur l’encadrement réglementaire des FinTech au regard de la croissance de leurs activités dans l’Union. A ce sujet, il a été précisé que, pour l’heure, aucune Fintech n’est autorisée par la Banque Centrale à mener des activités de banque, de système financier décentralisé (SFD) ou d’établissement de monnaie électronique. Ces structures sont généralement en partenariat avec les prestataires habilités pour offrir des services innovants notamment les banques qui portent la responsabilité des non-conformités ou des infractions relevées dans le cadre de la surveillance ou de la supervision. En complément, il a été indiqué que la Banque Centrale a mis en place un ‘‘Comité FinTech’’ qui a pour mission de promouvoir un développement harmonieux des FinTech afin de tirer avantage des opportunités qu’elles présentent pour renforcer l’inclusion financière des populations tout en préservant la stabilité du système financier de l’Uemoa.
La Banque Centrale a initié des actions structurées autour des quatre axes ci-après : des interactions étroites avec les FinTech dans le cadre d’un Bureau de Connaissance et de Suivi des FinTech (BCSF) qui a été créé en novembre 2021 ; la mise à disposition d’un Laboratoire d’Innovation Financière devant fournir un environnement de tests des produits et des services proposés par les FinTech de l’Uemoa, sous la surveillance du régulateur ; une veille technologique et réglementaire sur les innovations financières ; l’adoption d’un cadre réglementaire et d’un dispositif de supervision et de surveillance adaptés.
En tout état de cause, la Banque Centrale examine de très près le développement des Fintech et la conformité réglementaire des offres disponibles sur le marché et les actions appropriées sont mises en œuvre si nécessaire.
Évolution des transactions nationales (intra pays)
Les transactions de monnaie électronique au niveau local portent essentiellement sur les services de première génération (rechargements téléphoniques, retraits/dépôts, paiements marchands et de factures, transferts nationaux, etc.) et de seconde génération (micro assurance, crédit et épargnes numériques offerts par les banques, les SFD et les sociétés d’assurances).
Au second semestre 2021, le nombre de ces opérations est ressorti à 2,96 milliards pour une valeur de 34.847,87 milliards de francs CFA, représentant 97,75% de la valeur totale des transactions, contre 2,41 milliards de transactions estimées à 25.002 milliards de francs CFA à fin juin 2021, soit une hausse de 22,82% en nombre et 39,38% en valeur.
Évolution des transactions transfrontalières
Les services de paiement transfrontaliers offerts par les émetteurs de monnaie électronique se limitent aux États membres de l’Union. En outre, certaines banques ont noué des partenariats avec les établissements de monnaie électronique pour la réception de fonds internationaux sur les comptes de monnaie électronique.