(Comment le mensonge handicape facilement l’avenir des étudiants)
L’année 2022-2023 a démarré depuis quelques jours. Dans l’enseignement supérieur privé, les centres universitaires, écoles et autres instituts de formation démarrent une nouvelle année avec les inscriptions de nouveaux étudiants fraîchement libérés par le baccalauréat. Pendant que ceux-ci croient aux paroles mielleuses de ces centres de formations, leur avenir s’assombrit à petits coups car, au bout de leurs formations, les fruits ne justifieront pas la promesse de leurs formateurs. Et chaque année, le même scénario. Celui qui contribue à grossir inexorablement le rang des chômeurs et sous-employés.
Hervé CHABI
Les universités, instituts, écoles et centres privés de formations professionnelles ont une part considérable de responsabilité dans le chômage des jeunes au Bénin. En effet, obnubilés par l’appât du gain notamment un effectif à atteindre et un bilan financier honorable à réaliser, les instituts privés de formations, surtout dans l’enseignement supérieur, deviennent de sérieux handicaps à l’épanouissement professionnel des jeunes. Une des premières utilisées constitue les publicités mensongères. Tout en donnant du piquant aux qualités et omettant quelques défauts, les responsables d’instituts privés de formation créent un parfait décor illusoire qui attire les étudiants et parents dans le piège. Car, une fois que la première tranche de la scolarité est payée, le tour est joué. A Cotonou, Hermès K, gestionnaire d’une boutique de prêt à porter a partagé son expérience. « Je ne savais pas quoi faire après le baccalauréat. J’ai entendu çà et là, les parents, les amis et proches, parler de plusieurs universités privées puisque je ne voulais pas faire le public. Je suis allé me renseigner dans une université, on nous a dit que c’était bien. Ils avaient un bon cadre et c’était bien pendant la formation mais après il nous a fallu nous débrouiller pour trouver des stages académiques pour valider notre admissibilité. Et après, nous sommes livrés à nous-mêmes. Personnellement, j’avais choisi cette université parce qu’ils ont dit qu’ils ont des sociétés partenaires et qu’il y a possibilité qu’ils nous trouvent des emplois. Pour moi, il fallait juste être parmi les meilleurs et le tour est joué. Mais malgré nos résultats élogieux, l’univers du travail se situe dans une autre réalité. A l’université, on nous faisait rêver. Dans la réalité du monde du travail, on vous exploite tout simplement », a-t-il expliqué.
Les illusions des centres privés de formation se révèlent aussi à travers des informations sur leurs performances non seulement dans le taux de réussite aux examens mais aussi et surtout dans le taux d’étudiants ayant trouvé des emplois ou créer leurs entreprises. Avec des taux de réussite honorables, la plupart des universités privées s’en sortent au Bénin. Mais quant au taux d’étudiants qui vivent de leurs formations, les ‘’illusionnistes’’ prennent le relais. Là, quelques-uns des anciens étudiants, entre quatre et dix, sont présentés. Sur peut-être 800 étudiants formés par an depuis dix ans : les exemples de réussite de quatre ou dix suffisent pour faire pencher les étudiants et leurs pauvres parents. Pour les parents qui insistent, un taux de réussite honorable est avancé, avec certitude et conviction convaincante. Pas de preuve à part la parole du responsable d’université. Mais sa parole fait foi : il est illusionniste. Pour Aline C, secrétaire administrative à Cotonou, le manque de transparence constitue un véritable problème dans la réussite des choix de carrières des étudiants. « C’est normal que ces universités privées fassent du profit car c’est des investissements. Mais en tant que parents, nous aimerions qu’ils nous disent juste ce qui se passe réellement afin que nous sachions quoi faire très exactement pour avoir l’assurance que nos enfants auront à travailler dès qu’ils vont obtenir leurs diplômes. S’ils n’en sont pas capables, qu’ils le disent afin qu’on sache chercher ailleurs ou nous en occuper personnellement. Mais là au moins on ne les attend pas pour trouver du travail à nos enfants. Mais nous faire payer un service qu’on ne nous rend pas au final, ce n’est pas bien. Nous sommes tous des cadres », a-t-elle confié.