(Motiver à investir dans la terre en donnant l’exemple)
Les réalités du monde du travail, une fois les diplômes obtenus, astreignent les jeunes béninois à réfléchir à d’autres possibilités afin de réaliser leurs vies. Beaucoup n’y arrivent pas et rejoignent les rangs des chômeurs ou gagnent leurs vies à travailler à temps partiel ou intemporellement. Toutefois, des jeunes travailleurs arrivent non seulement à se réorienter mais aussi à gagner leurs vies en se livrant à des activités qui les passionnent. C’est le cas du jeune entrepreneur agricole Spinto Coasther Codjo. Initiateur du projet ‘’Jeune Parle Peu Agit Plus’’ il officie, avec ses partenaires et collègues, dans le domaine de l’agro- business avec notamment la production de produits tels que le manioc, le piment, le maïs, l’ananas, etc.
Quels sont les objectifs que vous visez en mettant en place ces initiatives ?
L’objectif premier de notre entreprise c’est de pouvoir motiver de plus en plus de personnes à investir dans la terre et pour y arriver nous devons donner l’exemple ! C’est à cet effet que nous avons initié le projet ‘’Jeune Parle Peu Agit Plus’’ (JPPAP) qui consiste à permettre aux personnes ayant des économies de pouvoir les investir en toute sécurité dans l’agriculture en Afrique. Ce qui nous a permis d’avoir à ce jour près d’une trentaine d’actionnaires un peu partout dans le monde.
Pouvez-vous nous faire un bref résumé de votre parcours académique et professionnel ?
J’ai commencé mon parcours scolaire à Lokossa où j’ai obtenu le CEP le BEPC et enfin le BAC. Ensuite je suis venu à Abomey-Calavi pour poursuivre avec l’université où j’ai notamment commencé avec la linguistique mais je n’ai pas fait long feu car je ne me retrouvais pas dans ce système. J’ai alors abandonné les études en première année de Linguistique et j’ai commencé avec les petits jobs. J’ai été coursier, gérant de bar, par moment démarcheur ; j’ai aussi été boy de maison. Et enfin j’ai atterri dans l’agriculture où je me sens enfin à l’aise. Je ne dirai pas qu’une chose en particulière m’a motivée à choisir l’agriculture, c’était une passion d’enfance. Je n’ai pas eu la chance d’avoir des parents agriculteurs. Ils ne voulaient d’ailleurs jamais me voir aller ou suivre les enfants de mon âge pour aller au champ les week-ends vu que nous étions dans un milieu où c’était pratiquement la seule activité.
Mais chose bizarre, le champ était la seule chose qui m’attirait. Tous les week-ends je suivais les paysans et avais hâte d’aller découvrir le maïs, l’arachide, etc. Pour moi ce n’était pas du travail. Certes on me payait mais je prenais ça pour de l’amusement et aujourd’hui aussi aller au champ, je ne le prends pas pour travail mais juste de la distraction. Aujourd’hui je dispose d’une vingtaine d’hectares de cultures et j’ambitionne l’implantation d’une usine de transformation de ces produits.
Comment vous organisez-vous dans le fonctionnement de vos activités ?
Le travail se fait en deux phases. En premier lieu il faut la conception du projet et ça je le fais en collaboration avec les experts du domaine. En seconde partie il faut descendre sur le terrain et travailler la terre et à ce niveau nous passons à la location des terres et formons ensuite des groupes de travail avec les habitants du milieu.
Je travaille essentiellement avec mes actionnaires, c’est à dire ceux qui achètent les actions de nos différents projets ! J’avais dit au départ que l’objectif c’était de permettre aux personnes ayants les moyens d’investir en toute sécurité dans l’agriculture. Donc dès que nous élaborons les projets, nous lançons la vente des actions pour lesdits projets. Cela nous permet le financement de ces projets. En dehors de ça je travaille également avec des ONG et aussi avec des particuliers.
Comment ont été vos débuts dans l’agriculture ?
Sincèrement mes débuts ont été très difficiles. J’ai commencé avec quelques kantis et aujourd’hui j’ai peut-être des hectares mais ce n’est pas encore ce que je veux. Je travaille toujours à pouvoir dans les années à venir, disposer de milliers d’hectares et implanter une grande usine à échelle mondiale.
Quels ont été les impacts de la Copvid-19 sur vos activités ?
Sincèrement la Covid-19 n’a pas négativement agit sur nous. Au contraire, beaucoup de produits vivriers ont pris de la valeur et c’est toujours bon pour les jeunes producteurs que nous sommes.
Quel bilan pouvez-vous faire pour le compte de l’année 2021 ?
2021 fut pour nous une année très décisive car nous avons lancé beaucoup de projets. Nous avons également connu des pertes surtout dans le domaine de l’élevage mais nous continuons le travail et attendons avec impatience 2022. Nous n’avons pas rendu ceci officiel mais il s’agit de plusieurs millions FCFA.
Quelles difficultés rencontrez-vous ?
Les premières difficultés sont liées au climat ! Aujourd’hui les règles qui nous permettaient de comprendre la pluviométrie ne sont plus tout à fait exactes. Nous sommes désormais appelés à nous appesantir sur nous-même et ne plus faire confiance à la mère nature. Donc nous réalisons la plupart du temps des forages, etc.
Nous rencontrons également des difficultés avec le personnel qui est en majorité constitué de villageois. Mais nous parvenons à gérer en mettant en place une bonne forme de communication.
Avez-vous connaissances des mesures gouvernementales notamment avec le FNDA pour financer les entrepreneurs agricoles ?
Évidemment que oui. Mais je n’ai jamais participé ou demandé le financement de mes projets par les mesures du gouvernement dans ce sens.
Quels conseils avez-vous pour la jeunesse béninoise à la recherche d’un emploi stable dans un bureau ?
En partie ce n’est pas le problème de la jeunesse mais de l’ancienne génération! Que nous ont-ils dit de l’agriculture ? Que dit aujourd’hui un parent à son enfant ? Va à l’école, étudie et demain tu seras un grand médecin, un avocat, etc.
Il faut que la base change. De même, notre système éducatif n’encourage pas l’entrepreneuriat. On nous forme pour tous devenir chômeurs ou attendre les concours. Il faut que nous jeunes cessions d’être ce que les gens veulent que nous soyons pour être plutôt ce que nous voulons être.
Avez-vous une préoccupation personnelle à aborder ?
Je voudrais pour finir dire merci au journal l’investisseur pour cette opportunité ! Enfin j’appelle mes frères et sœurs à faire de plus en plus confiance à la terre, elle n’a pas déçu par le passé nos ancêtres et ne nous décevra pas aussi ! Merci.
Interview réalisée par Nafiou OGOUCHOLA