(Un exemple palpable de ‘’désert de compétences’’ dans le secteur de la musique)
Les récentes activités du chanteur congolais Koffi Olomidé ont ramené sur le tapis, le sujet relatif aux prestations onéreuses des artistes étrangers au Bénin. Pendant que les artistes béninois se battent pour défendre les couleurs du pays et recevoir quelques sous, ceux venus d’autres pays se tapent la part du lion.
Daphnée OUNSOUGAN
La politique musicale adoptée et mise en œuvre par le gouvernement du Bénin fait la part belle aux artistes musiciens venus d’ailleurs. Cette politique est suicidaire et ne fait pas les affaires des béninois pour plusieurs raisons. Les artistes étrangers en prestations au Bénin sont payés à coups de dizaines de millions FCFA. Et les prix d’achat des tickets sont élevés en conséquence. Le problème ne se poserait pas si les artistes béninois jouissaient des privilèges similaires que ceux des étrangers au Bénin. C’est à la rigueur humiliant. D’une part, quand ils sont au Bénin, ils sont payés généralement quelques centaines de mille ou 1 ou 2 millions FCFA pour chauffer le public pour l’artiste étranger. D’autre part, quand ils réussissent aux prix de maints efforts à être programmés dans les pays africains, même dans la sous-région, c’est toujours pour chauffer le public. Donc, la plupart des artistes béninois sont relégués au second plan quand il s’agit d’un évènement majeur et les artistes étrangers sont les vedettes. C’est ainsi qu’un pan de l’économie culturelle du Bénin prend un gros coup. Car, les artistes étrangers viennent au Bénin faire des recettes et investir dans leurs pays alors que leurs homologues béninois jouent toujours les seconds rôles donc font des recettes qui leur permettent souvent de tenir le coup jusqu’à la programmation de la prochaine ‘’star’’.
L’actuelle politique culturelle répond à l’adage « Vendre la maison pour acheter le champ »
Le Bénin, il y a quelques décennies, était une référence en matière de musique avec le Tout puissant Poly Rythmo grâce à qui des millions de gens ont découvert l’existence du Bénin. Aujourd’hui, en investissant dans les stars africaines au détriment des musiciens béninois, on renforce les étrangers qui sont les meilleurs et on affaiblit les nationaux qui ont en fait besoin d’aide pour rehausser leur niveau. En langue nationale fongbé, cette situation se traduit par l’adage suivant : « Vendre la maison pour acheter le champ ».
La promotion de la culture béninoise doit prendre en compte l’accompagnement nécessaire pour aider les musiciens à réaliser des œuvres de très grandes qualités et progresser dans leur art. Au Nigéria, au Sénégal, en Côte d’ivoire ou au Ghana, les artistes nationaux sont préférés aux étrangers car ces populations savent que c’est leur devoir d’aider les leurs à être meilleurs que les autres. Au Bénin, il est dommageable de voir des hommes et femmes nantis imbus de tous leurs titres en être encore à poser des actes qui montrent qu’ils n’ont pas encore atteint le niveau de réflexion de l’ivoirienne qui, du fin fond de sa plantation de cacao se laisse bercer par les artistes nationaux. Au Bénin, on fait la part belle aux étrangers et on minimise les nationaux.