La communauté internationale a célébré, le samedi 17 juin 2023, la journée mondiale de lutte contre la désertification et la sécheresse. Au Bénin, l’Organisation non gouvernementale Sauvons l’Environnement BÉNIN (ONG SEB) n’est pas restée en marge de cette célébration. Après avoir mené des actions de reboisement les années antérieures, l’ONG SEB a initié pour l’édition 2023 des actions de sensibilisation sur différents canaux digitaux et dans la presse. En effet, à travers une interview accordée à notre Rédaction, la Directrice exécutive de l’ONG SEB, spécialiste des études prospectives, Mahoutondji Gilberte TOTIN, nous renseigne sur cette ONG sans oublier les implications liées au thème de cette année.
Lire ci-dessous l’intégralité de ladite interview.
L’investisseur : Comment peut-on présenter l’ONG Sauvons l’Environnement BÉNIN ?
Mahoutondji Gilberte TOTIN : L’ONG Sauvons l’Environnement BÉNIN (ONG SEB) est basé à Cotonou. Son actuel Conseil d’Administration est présidé par Ghislain GBAGLO. Elle est une émanation de l’ONG INTERNATIONALE SAUVONS L’ENVIRONNEMENT basée à Abidjan en Côte d’Ivoire et présidé par Dr Henri CHENAL. Elle est donc une antenne à l’image des 11 sections nationales ivoirienne, camerounaise, togolaise, burkinabé, sénégalaise, malienne, guinéenne, nigérienne, congolaise et canadienne. Son siège social est à Cotonou. Son objectif global est de contribuer à la protection de l’environnement et de la biodiversité.
De façon spécifique, elle œuvre pour l’éducation relative à l’environnement ; contribue à l’utilisation et à la valorisation des modes de productions et de consommations durables pour la sauvegarde de l’environnement ; assure l’insertion et la réinsertion des jeunes chômeurs par l’auto-emploi (reboisement, nettoyage, aménagement des berges de cours d’eau, traitement des déchets, pisciculture, etc.) ; promeut l’autonomisation des femmes par la création d’emplois durables ; suscite et soutient les initiatives locales de développement.

La journée mondiale de lutte contre la désertification et la sécheresse édition 2023 a pour thème : » Terre des femmes, droits des femmes ». Quel est l’état des lieux des droits fonciers des femmes au Bénin ?
Au Bénin, selon les coutumes locales, ce sont les chefs de famille qui administrent le patrimoine foncier familial. Les femmes accèdent généralement au foncier à une portion de terre qui leur est attribuée sur le domaine familial. Cet accès n’est pas souvent formalisé et tend généralement à être remis en cause que lors d’un événement majeur (décès du chef de famille, divorce, mariage par exemple). L’adoption et la mise en vigueur de la loi n°2013- 01 du 14 août 2013 portant Code Foncier et Domanial (CFD) en République du Bénin permet de plus en plus aux femmes d’accéder au foncier. Le CFD est venu unifier, harmoniser et simplifier la législation foncière et domaniale et supprimer certaines incohérences, abroger les lois obsolètes et mettre en œuvre de nouvelles dispositions appropriées. Aussi, la constitution Béninoise en son article 26 dispose que l’homme et la femme sont égaux en droit. Elle protège donc les droits de la femme et interdit à son encontre toutes discriminations. Mais notons que, malgré cet arsenal juridique qui offre à la femme des garantis d’accès à la terre et à la propriété foncière, l’accès aux ressources foncières continue d’être un véritable problème en raison des pesanteurs sociologiques consacré par le droit coutumier.
Quelles sont les difficultés liées au respect des droits fonciers des femmes au Bénin ?
Au Bénin, les difficultés que rencontrent les femmes découlent des normes établies de longue date. Les femmes sur différentes phases de leurs vies se heurtent à des normes sociales et barrières culturelles pour accéder au foncier sécurisé durant tout leur cycle de vie (jeune fille, mariée, mère, et veuve). Leurs droits d’utilisation des terres ne leur sont acquis que par l’intermédiaire de leur mari ou de leur père. La prédominance du patriarcat dans le droit coutumier garantit aux hommes de la famille que les terres familiales et les richesses qui en découlent demeurent leur propriété. Aussi, faut-il ajouter la méconnaissance des lois nationales et le taux élevé d’analphabétisation des femmes.
Quelles solutions préconisez-vous pour davantage de respect des droits fonciers des femmes au Bénin ?
Le respect des droits fonciers des femmes ne permet pas uniquement à celles-ci de prospérer. Il favorise également le bien être global de leur famille, en particulier de leurs enfants. Pour davantage de respect des droits fonciers des femmes au Bénin, il faut : travailler à changer la mentalité la population en les informant sur leurs droits ; traduire et vulgariser les lois sur la propriété foncière au Bénin ; associer les représentantes des femmes et les chefs des communautés locales à la formulation et la réforme des politiques foncières ; former et sensibiliser les hommes pour un changement positif des normes sociales et culturelles qui puisse faciliter l’accès sécurisé des terres aux femmes ; et mettre en place une législation facilitant l’enregistrement foncier des femmes qui possèdent des terres.
Quel message avez-vous à l’endroit des femmes béninoises ?
Aux femmes et filles, notre message est une invite à la résilience afin de s’inscrire dans la droite ligne de l’ODD 5 qui vise à parvenir à l’égalité des sexes et à autonomiser toutes les femmes et les filles. Pour ce faire, nous les soutenons à s’engager dans des groupes de soutien et des réseaux communautaires pour partager les connaissances et renforcer leur pouvoir collectif et défendre leurs droits.
Un appel à lancer aux autorités béninoises ?
Aux autorités, nous avons un message d’exhortation au renforcement de mesures de protection des droits des femmes et des filles dans le secteur foncier. L’évolution du cadre juridique et politique au niveau national est certes un indicateur rassurant la volonté politique de l’Etat. Mais au-delà de l’adoption des politiques et lois, il faut des actions concrètes qui lèvent les contraintes qui empêchent les femmes de bénéficier de leurs droits fonciers au même titre que les hommes. Nous souhaitons vivement que les autorités, dans l’élaboration des lois et des politiques susceptibles de rapprocher le droit formel du droit coutumier en matière de propriété foncière suit un processus inclusif. C’est à cette seule condition que l’accès des femmes au foncier sera effectif.
Interview réalisée par Nafiou OGOUCHOLA