« Chaque génération se doit d’apporter sa part à l’édifice pour aller de l’avant. Si nous ne progressons pas, qu’adviendra-t-il de nos sociétés ? »
La French-African Foundation, présidée par le banquier d’affaires béninois Khaled Igué a rendu public les résultats de l’appel à sélection des jeunes d’Afrique et de France dans le cadre de l’édition 2023 du programme Young leaders 2023, le mardi 16 mai 2023 à Marseille, en France. Les béninois Randa Adechoubou et Ouanilo Medegan ont été sélectionnés dans la catégorie ‘’Gouvernement et Organisation Internationale’’.
A travers une interview à nous accordée, la leader béninoise, responsable senior des partenariats à la Banque Mondiale, Randa Adechoubou, a ouvert un pan de sa vie professionnelle, sociale et culturelle afin de partager les expériences issues de son parcours et surtout d’inspirer les jeunes hommes et femmes du Bénin et d’Afrique à persévérer dans la recherche de l’excellence.
Lire ci-dessous, l’intégralité de ladite interview.
L’investisseur : Bonjour et félicitations pour votre sélection au programme Young leaders 2023. Comment avez-vous connu le programme Young leader ? Que représente-t-il pour vous ?
Randa Adechoubou : Je vous remercie pour l’opportunité. J’ai entendu parler du programme Young Leader à travers d’autres lauréats Béninois qui ont fait partie du programme, en particulier ma sœur et amie Maryse Lokossou, aujourd’hui Directrice de Cabinet du Président de la Banque Ouest Africaine de Développement (BOAD). Mes remerciements vont à elle mais aussi à Khaled Igué et l’équipe de la French-African Foundation pour m’avoir sélectionnée. Je suis très ravie de faire partie de cette cohorte 2023 et j’ai hâte de rencontrer et d’échanger avec les autres lauréats.
Vous êtes responsable senior des partenariats à la Banque mondiale. En quoi consiste votre travail ?
Je suis très fière de travailler, au sein du groupe de la Banque Mondiale, pour le Partenariat Mondial pour l’Education (en Anglais GPE : Global Partnership for Education). GPE est le plus grand fonds au monde dédié exclusivement à offrir une éducation de qualité à tous les enfants dans les pays à faible revenu. Nous œuvrons à aider les pays partenaires à bâtir des systèmes éducatifs plus solides servant de tremplin vers des économies plus fortes et des sociétés plus justes et stables.
Mon travail au sein de GPE consiste à construire des partenariats public-privé aussi bien en matière de ressources financières, que du savoir-faire et des outils pour aider à résoudre des défis les plus complexes en matière d’éducation. J’ai un champ d’action sur le portfolio entier de GPE qui compte environ 100 pays.
Quelles ont été vos formations universitaires ? Quel parcours vous a mené à votre poste actuel ?
Je suis diplômée en Finance (Georges Mason University), en Sciences Politiques (Northwestern University) et j’ai un MBA (University of Cape Town). J’ai travaillé un peu partout et dans plusieurs domaines : Droit, Santé, Industries créatives, Education… J’ai commencé ma carrière dans un Cabinet d’avocats en Virginie, spécialisé en droit des affaires avant de rejoindre le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme, à Genève. Je me suis ensuite relocalisée en Afrique du Sud ou j’ai dirigé la stratégie et les programmes genre de la Fondation Motsepe avant d’atterrir dans ma fonction actuelle. J’ai aussi lancé une maison d’édition, Iya-Oloka, et j’espère qu’à travers cette maison je vais pouvoir produire des livres sur des histoires positives et inspirantes.
Vous impactez des partenaires de la Banque mondiale, des investisseurs et la jeunesse africaine par votre leadership. Qu’est-ce qui vous motive à ne pas vous contenter de vos acquis et repousser vos limites ?
Je pense que dans la vie, il est très important de définir très tôt sa vision. A partir de cette vision, j’ai su que pour atteindre mes objectifs que porte cette vision, il me fallait ajouter des atouts à ma feuille de route. Je ne pouvais pas rester telle que j’étais. Il fallait que je sorte de ma zone de confort et repousser les limites pour arriver aux objectifs que je me suis fixés. Chaque niveau supérieur demandera une version supérieure de vous ! Je sais aussi que quand je progresse, ce n’est pas seulement pour moi. Nos parents ont fait leur part pour notre génération ; notre génération et celles à venir doivent continuer à faire avancer les choses et ça demande que nous nous donnions encore plus !
Randa Adéchoubou, vous êtes aussi auteur, conférencier, bâtisseur communautaire. Pourquoi cette envie de partager avec les autres ?
Je suis là où je suis parce que d’autres ont partagé avec moi leurs savoirs, leurs avis et conseils. Je ne serai pas là ou je suis aujourd’hui si d’autres personnes n’avaient pas pris le temps de me conseiller et de m’appuyer. Pour avancer dans nos communautés, nous devons absolument partager et échanger. Non seulement on apprend dans ce processus mais on partage aussi notre savoir. Faire partir d’une communauté, c’est ça – partager avec les autres, désirer leur succès et les appuyer afin qu’ils trouvent leur chemin et partagent encore plus avec d’autres. C’est la roue qui tourne.
On remarque dans vos publications, notamment sur randaadechoubou.com que vous ne vous adressez pas exclusivement aux femmes, comme la plupart des femmes leaders, mais vous vous adressez à tous les genres. Pourquoi ne vous arrêtez-vous pas aux femmes et vous travaillez pour tout le monde sans distinction de sexe ?
Chacun d’entre nous a sa part à apporter à l’édifice. Au fond, que nous soyons hommes ou femmes, nous avons besoin d’être vus, entendus et appréciés. Je milite pour une société où tout le monde est valorisé. Quand j’ai une idée pour un manuscrit, je ne fais pas une distinction de sexe. Les émotions, le doute, le manque de confiance en soi sont des sujets qui nous interpellent tous, que nous soyons homme ou femme. Le but de mes publications est de nous faire prendre conscience de la force intérieure que nous avons en nous et nous exhorter à l’utiliser pour accomplir nos rêves. Et cela s’applique à tous les genres.


Dans votre livre ‘’Braver, Bolder, Better’’, vous apprenez aux lecteurs à opérer des changements dans leurs vies pour améliorer leurs performances. Pourquoi voulez-vous rendre les gens, même ceux que vous ne connaissez pas « …plus courageux, plus audacieux et meilleur » ?
Nous vivons dans un monde hyper compétitif et complexe. Tôt ou tard, chacun d’entre nous va être confronté à des situations qui vont nous demander de l’audace, du courage et du meilleur de nous. J’ai appris très tôt que ceux qui réussissent ne sont pas toujours les plus brillants à l’école mais ceux qui sont assez de courage pour essayer même quand ils échouent et ceux qui n’arrêtent jamais d’apprendre et qui sont ouverts d’esprit.
Quels sentiments vous animent quand le programme Young leaders 2023 reconnaît vos mérites en vous sélectionnant dans la catégorie ‘’Gouvernement et organisation internationale’’ qui regorge de cadres très compétents en Afrique et en France ?
Je suis fière d’avoir été sélectionnée dans ce groupe de talentueux cadres en Afrique et en France. Mais plus que tout, je suis heureuse de faire partie d’un programme qui représente beaucoup pour le futur des relations entre la France et l’Afrique. Nous apportons des talents et des atouts différents qui vont contribuer à des meilleures relations entre nos pays respectifs mais aussi servir à renforcer les relations entre l’Afrique et la France.
Peut-on savoir où vous avez acquis ou qu’est-ce qui vous a permis d’acquérir ces vertus (aider à progresser) qui sont choses raririssimes dans la société d’aujourd’hui ?
Tout d’abord l’inspiration vient de mes parents. Ils ont toujours œuvré à nous inculquer des valeurs morales, le sens de l’effort, du travail bien fait et chercher à voir les gens au tour d’eux progresser, se dépasser et aller plus loin. J’ai grandi dans un environnement marqué par l’encouragement vers la découverte, la curiosité et l’excellence. Et puis ce qui m’anime, c’est le futur, les générations qui viendront après la nôtre. Chaque génération se doit d’apporter sa part à l’édifice pour aller de l’avant. Si nous ne progressons pas, qu’adviendra-t-il de nos sociétés ?

Qu’attendez-vous de votre participation au programme Young leader 2023 ?
J’espère pouvoir partager mes perspectives, mes idées et projets avec ce groupe et travailler ensemble avec ce groupe à leur mise en œuvre au profit de nos sociétés. C’est bien l’ambition de ce programme.
Quel message avez-vous à l’endroit des jeunes béninois et africains qui hésitent encore à postuler pour ce programme ?
Bien que je sois personnellement au tout début de cette aventure, je dirai simplement aux jeunes béninois et africains qu’il n’y a pas d’hésitation à avoir. C’est une excellente initiative qui va progressivement favoriser l’émergence d’un leadership de notre génération dans les domaines économique, politique, sociale et culturelle…
Avez-vous une préoccupation personnelle à aborder ?
Je voudrais encore une fois vous remercier pour l’interview et souhaiter bonne continuation à L’Investisseur.
Interview réalisée par Nafiou OGOUCHOLA