Un projet calqué sur le modèle des ‘’zém’
Lentement mais sûrement, le Programme d’Actions du Gouvernement « Bénin Révélé » se concrétise dans le secteur du transport urbain à Cotonou avec le projet « Bénin Taxi ». Ces quelques mots du ministre d’Etat chargé du Plan et du Développement, Abdoulaye Bio Tchané, représentant le Chef de l’Etat, le lundi 3 juillet 2017, au lancement officiel de « Bénin Taxi », transcrivent les hautes attentes portées dans ce projet.
Six années plus tard, la rédaction de L’investisseur, au détour d’une certaine actualité, a cherché à comprendre le fonctionnement de ce projet qui porte la vision du président de la République. Lors de nos investigations, nous n’avons malheureusement pas obtenu de réponses aux multiples sollicitations des hauts cadres du Centre de Partenariat et d’Expertise pour le Développement Durable (Ceped). En attendant des réponses aux nombreuses questions qui nous taraudent l’esprit, nous vous présentons un regard sur le fonctionnement de ce projet, vu de l’extérieur.
Nafiou OGOUCHOLA
Le projet Bénin-taxi, géré par le Centre de Partenariat et d’Expertise pour le Développement Durable, à ce jour fonctionne simplement comme un partenariat entre les conducteurs de ‘’zémidjans’’ et les propriétaires de motos. Selon les informations recueillies, en attendant la vérité officielle, les conducteurs de Bénin taxi payent simplement leurs redevances au Ceped et n’attendent rien en retour. En effet, comme le conducteur de taxi-moto, le conducteur de Bénin taxi se doit lui-même de trouver les clients. Au démarrage du projet en 2017, un call-center avait été rendu disponible, comme c’est le cas avec toute société qui offre des services de déplacement aux privilégiés. Mais depuis quelques années, les conducteurs de Bénin taxi se démerdent pour trouver des clients vu que le call-center ne fonctionne plus, peu importe la raison. De même, le conducteur de Bénin-taxi ne bénéficie pas d’avantages sociaux notamment l’affiliation à la Caisse nationale de sécurité sociale. Ni d’assurance maladie. Une vie de ‘’zém’’.
Des conducteurs pourchassés, des clients mis en danger, des véhicules arrachés en circulation
Des conducteurs de Bénin-Taxi ont été poursuivis par des agents du Ceped pour leur arracher les véhicules pour défaut de payement. De sources concordantes, il ressort que des courses-poursuites ont eu lieu. Des fois, des conducteurs avaient des clients à bord et avaient essayé de semer leurs poursuivants en mettant la vie des passagers en danger. Pour les moins chanceux, leurs poursuivants immobilisaient les véhicules avant de les débarquer pour repartir et les abandonner à leurs sorts. Par exemple, un conducteur de Bénin-Taxi s’est vu surprendre un matin à 7 heures alors qu’il stationnait devant la maison d’un client pour déposer ses enfants à l’école. Le client a dû faire appel à un autre véhicule pour déposer ses enfants à l’école.
Les payements échelonnés selon une logique irrégulière
Les payements exigés des conducteurs de Bénin-Taxi, obéissent à une logique irrégulière selon les termes des contrats signés en octobre 2017. En effet, il est demandé de payer par jour, 6.000 FCFA la première année, 7.500 FCFA la deuxième année, 10.500 la troisième année et 12.000 FCFA la quatrième année. Pourquoi payer moins quand le véhicule est neuf et plus quand le véhicule est moins neuf ? Mieux, comment peut-on demander 4.000 FCFA aux conducteurs la première année où ils avaient l’assistance du call center pour trouver des clients et demander plus chaque année alors que le call center n’a travaillé qu’un an environ. Dès la deuxième année, les conducteurs devaient trouver eux-mêmes leurs clients mais continuer de faire plus de recettes.
Des conducteurs entre le marteau et l’enclume
Les conducteurs de Bénin Taxi se rendent vite compte de ce qu’ils sont pris dans un engrenage aux mille interrogations. En effet, dès qu’ils commencent par effectuer les payements ils se rendent compte qu’ils ont deux possibilités désormais : finir de payer ou perdre ce qui a déjà été payé. Car en cas de non-respect des clauses, le payement y compris, les véhicules sont arrachés sans autre forme de procès.
Les députés doivent sauver les conducteurs, interpeler le gouvernement
Les représentants du peuple béninois au Parlement doivent chercher à comprendre davantage le fonctionnement du projet Bénin-Taxi. Car, devant le refus des autorités de fournir des informations pour éclairer l’opinion publique sur certaines questions, c’est aux députés de la 9ème législature que revient le devoir d’aider le peuple dans sa quête de vérité. En adressant des questions au gouvernement, ils auraient joué leur partition en éclairant les zones d’ombre de ce projet qui était annoncé comme « le Programme d’Actions du Gouvernement « Bénin Révélé »… dans le secteur du transport urbain ».