La Banque centrale des Etats d’Afrique de l’ouest (BCEAO) a rendu publique une étude relative au degré de transmission des prix internationaux aux prix domestiques dans L’union économique et monétaire ouest-africaine (Uemoa).
Luc TOSSOU
La BCEAO recommande aux Etats de l’Uemoa de prendre des dispositions idoines pour réduire leur dépendance vis-à-vis des produits alimentaires importés. « …les pays de l’UEMOA devraient prendre des mesures pour réduire leur dépendance extérieure en produits alimentaires importés, à travers des actions visant à rendre le secteur agricole moins vulnérable aux chocs climatiques et en promouvant davantage la transformation locale », a noté le rapport publié. « S’agissant des produits pétroliers, la mise en œuvre d’une politique d’ajustement régulier des prix et la réduction de la fiscalité devraient permettre de mieux contenir la transmission des prix internationaux », complète ledit document.
Au niveau international, les cours mondiaux du pétrole brut se sont inscrits dans une tendance haussière depuis la fin de l’année 2020. Ainsi, les cours de l’or noir ont progressé de 64,4% en 2021 et de 54,1% en 2022. S’agissant des produits alimentaires importés par les pays de l’Union, leurs prix sont également en progression notamment à partir de l’année 2020 où ils sont ressortis en hausse de 15,5%. En 2021 et 2022, ils ont connu des hausses respectives de 7,8% et 37,3%. L’évolution des cours internationaux a des répercussions sur l’inflation dans l’Union en raison notamment du poids important (30,0%) des produits importés dans l’indice des prix à la consommation. Toutefois, la transmission des prix internationaux aux prix domestiques n’est pas parfaite, en raison du fonctionnement des marchés de la zone marqué notamment par des dispositifs de régulation des prix et souvent des mesures d’atténuation de la répercussion des chocs observés à l’international. Prenant appui sur des modèles à correction d’erreur, l’étude a examiné le degré de transmission des prix internationaux sur les prix domestiques. L’analyse a porté sur les produits pétroliers et alimentaires, notamment l’essence à la pompe, le riz, le blé, les huiles, le sucre et les produits laitiers.
Au titre des produits alimentaires importés, les chocs sur les cours mondiaux affectent positivement l’inflation dans l’Union. Il ressort des résultats de l’étude que 68% des fluctuations des cours mondiaux du riz se répercutent sur les prix domestiques du riz. Le degré de transmission est évalué à 59% pour les huiles, 45% pour le blé et 38% pour le sucre. Les chocs sur les fluctuations internationales sont absorbés avec un délai moyen de dix mois pour le riz et les huiles, quinze mois pour le sucre et vingt mois pour le blé. Toutefois, l’impact sur les premiers mois est faible, en raison des interventions des Autorités publiques et des délais d’approvisionnement des marchés locaux. En ce qui concerne les produits laitiers, les chocs à l’international n’ont pas un impact significatif sur les prix domestiques, sauf au Sénégal, au Togo et au Mali. En effet, une hausse de 10% des cours mondiaux des produits laitiers induit de légères hausses des prix domestiques de 0,2% au Sénégal et au Togo, et de 0,9% au Mali. Au total, les fluctuations internationales des cours des produits alimentaires impactent positivement l’inflation dans l’Union. Une hausse de 10 points de pourcentage des cours mondiaux des produits alimentaires induit une progression de l’inflation de 2,3 points pour la composante alimentaire et une hausse de 1,2 point pour l’inflation globale.
En ce qui concerne la transmission des prix internationaux du pétrole, les résultats des estimations montrent qu’une hausse de 10% des prix à l’international induit une hausse de 4,6% des prix de l’essence à la pompe dans l’Union et entraîne une progression de l’inflation de 0,5 point de pourcentage. Les chocs internationaux sont absorbés dans un délai de dix mois. L’analyse par pays montre que la transmission des cours mondiaux du brut sur les prix de l’essence à la pompe est plus forte au Togo et au Bénin, avec des effets respectifs de 5,3% et 6,3% pour une hausse des cours mondiaux de 10%, dans un délai moyen d’absorption de huit mois. Il convient de souligner que la hausse des prix internationaux du pétrole n’a pas d’impact sur les prix de l’essence à la pompe au Niger où les prix ont été bloqués par l’Etat. Le prix de l’essence à la pompe est maintenu inchangé dans ce pays depuis 2013 et se situe à 540 FCFA le litre, soit le tarif le plus bas observé dans les pays de l’Union.
Cette étude se propose de mesurer le degré de transmission des fluctuations des cours mondiaux des produits alimentaires et pétroliers sur les prix domestiques dans l’UEMOA. Elle s’inscrit dans le cadre de la dynamique d’amélioration de la connaissance des économies de l’Union et le renforcement de l’efficacité de la politique monétaire dans un contexte de tensions inflationnistes aussi bien au niveau interne qu’à l’échelle internationale.