La restitution des œuvres d’art au Bénin et au Sénégal est une victoire historique des Etats ayant subis les affres de la colonisation il y a plusieurs décennies. La France va rendre légalement un sabre historique (le sabre d’El Hadj Oumar Tall) au Sénégal et vingt-six objets du patrimoine béninois. En Afrique où bon nombre de citoyens pensaient cette action impossible, son aboutissement ravive la flamme d’autres espoirs. Une formidable réussite à mettre sur le compte du gouvernement de la République du Bénin.
La restitution des œuvres d’art au Bénin et au Sénégal est un succès diplomatique du Bénin qui a des répercussions sur tout le continent. En effet, au-delà de la simple restitution, plusieurs aspects importants sont à souligner, car ils influenceront désormais les rapports non seulement entre les anciennes colonies et les Etats africains mais aussi entre les Etats africains eux-mêmes. Tout d’abord, les Etats africains et ceux du monde entier se rendent aujourd’hui compte de la haute vision du gouvernement du Bénin sous le leadership du président Patrice Talon. Quand le gouvernement du Bénin s’était lancé dans l’offensive de la restitution de ces biens, beaucoup n’y croyaient pas. Autant au Bénin, en Afrique qu’en occident et partout dans le monde, beaucoup ne croyaient pas que la France allait accéder au desideratum du gouvernement du Bénin. Ceci étant, désormais quand le gouvernement du Bénin se lancera dans une offensive d’envergure, quel que soit le secteur d’activités, en Afrique, en Europe et partout dans le monde, on lui prêtera attention. Ainsi la diplomatie béninoise est reconnue et honorée grâce à ses performances. Et elle sera davantage respectée et crainte car elle a réussi à reprendre les biens culturels du Bénin.
Ensuite, à travers cette restitution, on note avec satisfaction que la vision de développement du tourisme béninois déclinée dans le Programme d’actions du gouvernement (PAG) est réaliste. Mieux, il apparaît aujourd’hui clair que le gouvernement a les capacités de réaliser ses ambitions telles que notifiées dans le PAG. Ainsi, le développement du tourisme n’est pas un vain mot du gouvernement. C’est un projet d’envergure qui prend corps non seulement grâce à des réalisations concrètes mais aussi au dynamisme du gouvernement.
Pour finir, la restitution des biens culturels au Bénin et au Sénégal impacteront durablement le tourisme non seulement de ces deux Etats mais aussi de toute l’Afrique. Car les touristes devront effectuer visiter ces pays pour admirer les œuvres culturelles auxquelles ils avaient accès en France. Ensuite, les touristes pourront visiter d’autres trésors et biens culturels de ces pays en dehors de ceux qui viennent d’être restitués. Enfin, après avoir visité les œuvres restituées au Bénin et au Sénégal, les touristes pourraient décider de visiter les œuvres des Etats limitrophes ou d’autres Etats africains.
L’Afrique prendra désormais exemple sur le Bénin
Le succès diplomatique du Bénin renforcera les convictions de tous les Etats africains dans la recherche de solutions pour impacter leur développement. Au-delà de l’aspect culturel, les Etats d’Afrique savent qu’il est aujourd’hui possible de réclamer justice aux puissances mondiales. Sur les plans politique, économique et autres, les dirigeants africains pourront se référer au travail effectué par le Bénin pour se convaincre de ce qu’ils peuvent faire bouger les lignes à force de travail et d’abnégation.
De même, il faut noter que cette restitution ouvre la voie à tous les Etats africains qui pourront récupérer aussi leurs œuvres pillés pendant la colonisation. Raison pour laquelle un responsable français avait affirmé : « … ce projet de loi crée un précédent, et je pense que le jour où le Mali et la Côte d’Ivoire vont aussi faire des demandes, celles-ci vont être écoutées, car il y aura déjà eu la jurisprudence Bénin et Sénégal ».
Historique d’une diplomatie économique
Une demande inédite qui a finalement abouti grâce au dynamisme, à la ténacité et à l’engagement du chef de la diplomatie béninoise sous la direction et les instructions du chef de l’Etat, le président Patrice Talon. Un combat assorti d’un engagement qu’il a fait sien durant deux ans. Dès avril 2016, le ministre des Affaires étrangères, Aurelien Agbénonci, sur instruction du chef de l’Etat avait déjà pris ses marques dans ce dossier. Le 27 juillet 2016, soit trois mois après sa prise de service, Aurélien Agbénonci avait adressé un courrier à son homologue français Jean-Marc Ayrault pour réclamer au nom du gouvernement béninois, le retour dans le patrimoine culturel national, des biens historiques pillés au Dahomey au cours de l’époque coloniale par les troupes du général Dodds. A cette demande légitime, c’est une fin de non-recevoir catégorique que la partie française a opposée au gouvernement béninois en mars 2017. Mais cela n’a aucunement émoussé la détermination du gouvernement béninois et de son chef, le président Patrice Talon qui a instruit son ministre des Affaires étrangères à poursuivre l’offensive.
Ainsi, grâce au leadership éclairé, l’offensive diplomatique clairvoyante et le sens de négociation du ministre Aurélien Agbénonci, de notables avancées ont été enregistrées notamment au cours de la séance de négociation du lundi 3 avril 2017 à l’issue duquel le chef de la diplomatie béninoise a affirmé que, “l’espoir est permis”. De l’espoir à la réalité, la ténacité et l’engagement du ministre Aurélien Agbénonci ont payé car depuis la mise sur pied le 5 mars de la mission confiée à Bénédicte Savoy et Felwine Sarr suite au passage du chef d’État béninois en France, l’homme n’a ménagé aucun effort pour que le Bénin recouvre ce patrimoine “exilé”.
Des petits plats dans les grands pour une bonne gestion des œuvres restituées
Dans la programmation de la semaine culturelle du Bénin au musée du quai Branly, la matinée du jeudi 28 octobre 2021 a été marquée par la présentation des projets muséographiques en cours au Bénin. La mise en lumière desdits projets a été assurée par Alain Godonou, directeur des programmes musée au sein de l’Agence nationale pour la promotion du tourisme au Bénin (ANPT). De la présentation faite, pour renforcer l’arsenal muséal existant et de ce fait l’attractivité touristique du pays, 4 grands nouveaux musées sont en développement au Bénin.
Il s’agit du musée international de la mémoire et de l’esclavage (MIME) à Ouidah ; du musée de l’épopée des Amazones et des Rois du Danhomè à Abomey ; du musée international du Vodun à Porto-Novo et du musée des arts contemporains de Cotonou.
Symbole de la volonté du gouvernement du Bénin de faire de la promotion de son patrimoine un levier de développement, la construction de ces différents espaces mobilise un investissement colossal de plus d’un milliard d’euros soit six cent cinquante-quatre milliards FCFA (654 042 696 500 FCFA) pour faire du tourisme et du patrimoine, des leviers de création de richesse et de l’emploi. Cet investissement sans précédent apporte des réponses claires aux questions du retour des biens restitués et sur le positionnement du Bénin en tant que protagoniste dans la circulation du patrimoine et de l’art contemporain.
Avec la présentation de la scénographie d’expositions et du programme muséal autour du patrimoine béninois, Franck Houndégla, scénographe et chercheur en architecture est venu confirmer davantage les ambitions affichées par le Bénin dans ce processus de restitution.
Partant de l’évidence que la promotion du patrimoine béninois ne peut s’opérer uniquement par le secteur public, la semaine culturelle du Bénin à Paris a servi également de tribune aux acteurs privés du secteur. Ainsi, Marie-Cécile Zinsou, créatrice et présidente de la Fondation Zinsou et Noureini Tidjani – Serpos, écrivain et ancien fonctionnaire de l’UNESCO ont tour à tour, partagé leurs expériences. La première, sur les 17 années passées à la tête de la fondation Zinsou et le second sur l’exemple du Musée Abdou Tidjani Serpos et sa place au sein de la Fondation panafricaine pour le développement culturel de Porto-Novo et son articulation avec les collections nationales. A leur suite, Marius Bajide Dakpogan, conservateur au musée d’Abomey a, à travers une présentation, passé en revue des objets symboliques disponibles au sein du musée.
Luc TOSSOU