Awaï, petit village de la commune de Kétou, d’environ quelques milliers d’âmes, dans le département du Plateau, a été le centre d’attraction, ce 31 octobre 2022, de la dernière vague de soutenances de thèse de doctorat unique de l’Université nationale d’Agriculture (UNA).

Trois jurys pour trois thèses ont ponctué cette journée, du 31 octobre, à l’UNA. Au nombre de ces soutenances, une a particulièrement marqué les esprits pour être la dernière de la série, clôturant ainsi en beauté l’année académique 2021-2022 entamée en janvier passé. Cette soutenance de thèse a notamment écopé d’une des meilleures appréciations possibles, sous la clameur rythmée d’un public massé nombreux dans la salle de conférences, depuis la mi-journée jusqu’aux environs de 20h 30. Le jury de thèse a reçu le document dans la forme comme dans le fond avant de lui accorder urbi et orbi son appréciation. Et il aura suffi de quatre tours d’horloge pour le candidat Marc Yaovi VODOUNOU de se voir conférer le prestigieux titre de docteur, avec à la clé la «mention très honorable» prononcée du timbre de la voix souvent légèrement enrouée mais assez audible du président de céans, le Professeur de rang magistral Pascal HOUNGNANDAN. A cet énoncé, la salle se remue sous les «hourrahs» qui s’élèvent au-dessus du bâtiment et qui ont failli faire rompre l’applaudimètre de l’ouïe de chacun dans le public.
Dans les starting-blocks des soutenances de thèse à l’UNA, il y a cinq ans, Dr Marc Y. VODOUNOU est de la dernière cohorte programmée de 2021-2022, en phytopathologie, sa spécialité. Le tout nouvel impétrant entre dès lors avec brio au couvent encore restreint des chercheurs béninois de phytopathologie végétale. Pour cela, il a dû soumettre les résultats de ses recherches de terrain jugés «de qualité scientifique irréprochable et présentés dans un speech limpide et accessible à l’auditoire moyen», dont d’ailleurs une partie a eu droit, sur les exigences du Professeur HOUGNANDAN, à la traduction par le candidat du résumé de sa thèse dans sa langue nationale sahouè, pour les besoins de compréhension de ses parents et amis venus en masse le soutenir.
L’alimentation des populations au cœur de la recherche…
Le sujet de thèse est ainsi libellé et est d’importance: «Mitigation de la maladie du Bunchy Top du bananier: identification des stratégies de contrôle du virus basée sur une approche participative au Bénin». Le jury de thèse lui ayant accordé la plus élevée des mentions est de dimension internationale et composé d’enseignants-chercheurs de haut vol. Le Professeur Jacques MAVOUNGOU (Gabon) et le Professeur Banito AGNASSIM (Togo) étaient de la partie, par visio-conférence. Le premier, rappelons-le, est membre influent du Conseil Africain et Malgache de l’Enseignement Supérieur (CAMES). En présentiel, face au candidat, il y avait leurs collègues de rang magistral, les Professeurs Pascal HOUNGNANDAN, Corneille AHANHANZO de l’Université d’Abomey-Calavi (UAC) et Valérien ZINSOU de l’Université de Parakou. Dr Apollinaire ADANDONON et Dr Martine ZANDJANAKOU-TACHIN, tous de l’Université Nationale d’Agriculture (UNA), n’ont pas manqué à l’appel du devoir. Dr ZANDJANAKOU-TACHIN est, par ailleurs, la directrice de thèse du candidat et directrice de l’Ecole Doctorale des Sciences Agronomiques et de l’Eau (EDSAE) de l’UNA. Le succès de son poulain, dont les travaux ont porté sur l’une des pires maladies des bananiers est, au-delà de tout, le sien propre. Et cela, pour les deux précédentes qualités ajoutées à la troisième qui s’attache à sa personne pour faire d’elle la coordonnatrice du projet de relance de la filière banane-plantain au Bénin et dénommé BBTV-Mitigation. Ledit projet est en cours de mise en œuvre depuis 2013. C’est son fonctionnement qui a inspiré le choix du sujet de thèse de Dr Marc VODOUNOU. La thèse de doctorat de ce dernier a pour objectif: «de rapporter les connaissances des producteurs quant à la manifestation du BBTV et d’identifier les différentes poches du virus, afin de prévenir la distribution dans les zones favorables à la culture pour améliorer les rendements par la maitrise des méthodes de lutte adéquates».
Aux dires du jeune chercheur, «les enquêtes ont été menées auprès des producteurs dans six zones agro-écologiques au Bénin en vue de recueillir et de rechercher le virus. Des échantillons de feuilles (250) de bananiers et des pucerons (20.946) ont été collectés et analysés…».
On sait que la banane occupe une place importante dans l’alimentation des populations béninoises et qu’elle est très recherchée pour son fruit qui est une source d’énergie alimentaire de valeur. La maladie virale du bananier, le Banana Bunchy Top Virus (BBTV) qui l’attaque constitue une contrainte majeure à la production en quantité des Bananes de qualité. Le BBTV est considéré comme le virus le plus dévastateur des bananiers dans 18 pays africains, y compris le Bénin, où il a été détecté pour la première fois en 2011 à Dangbo dans la vallée de l’Ouémé. Le statut du virus demeure inconnu dans les communes d’intervention du projet BBTV Mitigation et zones de production de bananes, malgré les plaintes de certains producteurs.
C’est donc, un travail colossal de recherche qui a été abattu en 5 laborieuses années, pour aboutir à la récompense mémorable, de la mention «très honorable», aussi bien pour le tout nouveau docteur, sa directrice de thèse que pour la communauté de l’UNA et les paysans-producteurs de la denrée ainsi que pour le projet BBTV-Bénin. Sa contribution au développement de l’économie de notre pays tient de ce que la filière est au cœur des axes prioritaires du Programme d’Action du Gouvernement du Bénin, en matière agricole.
Sourou Emmanuel